Extraits de ”Les Colombes d‘Amchit, ou ma vie comme un jeu,” de Pascale Lahoud.

Le tremblement de terre qui, le seize mars mille neuf cent cinquante-six provoqua la mort de quatre-vingt-cinq personnes au Liban, me fit naître à Beyrouth. N’importe comment je serais née, mais un peu plus tard. J’aurais pu m’appeler Hazzée (tremblement) comme un certain nombre d’enfants venus au monde le même jour, mais mes parents m’attendaient pour Pâques et ils y tenaient tellement à leur échéance que, traitant par le mépris ce sacré séisme qui avait tout fait rater, ils me baptisèrent quand même Pascale.

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Car ma mère est française. Elle s’appelle Denise mais elle est devenue Dany pour tout son entourage. Employée de bureau à Paris elle décida un beau jour d’entreprendre un pèlerinage à Jérusalem sur une moto à trois roues avec une amie sur le siège arrière. C’était en 1952 et on parlait alors beaucoup au Liban du Père Charbel, un saint homme. Pour parfaire leur circuit spirituel ma mère et son amie poussèrent donc jusqu’à Annaya, là où repose le bienheureux. L’endroit doit être privilégié puisque mon père et ma mère s’y connurent. Ils se marièrent quelques semaines plus tard. Un mariage qui – bien que célébré tout à fait discrètement – fit parait-il beaucoup de bruit. […] Pour ma famille paternelle ma mère était en effet un cas, un phénomène qu’on aurait préféré admirer ailleurs. Française faiblement pourvue d’argent, et de plus paralysée des membres inferieurs, ne se déplaçant qu’en fauteuil roulant à la suite d’une poliomyélite contractée à vingt ans, elle ne pouvait, pour toutes ces bonnes raisons être admise avec enthousiasme chez les fiers Lahoud.

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L’idée en avait été lancée par maman, lasse de recueillir bénévolement a la maison les touristes en perdition que mon père, toujours en vadrouille dans les environs, lui ramenaient le soir. Moi je pensais qu’ayant tenté déjà, sans grands succès d’ailleurs, l’élevage des vaches, lapins, des gazelles, des porcs, des poulets, des oies et d’une quantité d’autres animaux sauvages ou domestiques, nous pouvions bien faire un essai sur les campeurs, espèce alors inconnue au Liban. Certes il faudrait s’en occuper un peu, mais ceux-ci au moins s’étrillaient et se nourrissaient tout seuls. De plus ils étaient vaccinés contre toutes sortes de maladies : il n’y avait donc pas à craindre de mortalité en série comme pour nos lapins ou pour nos poules.

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Notre terrain de camping fut ouvert aux touristes en été mil neuf cent soixante-cinq. Quatre autres terrains ouvrirent cette année la. Ce furent les premières installations de ce genre au Liban […] La première saison fut folklorique et attira sur nos terres, de tous les alentours plus de curieux, que le zoo de Vincennes ne reçut de visiteurs en même temps.

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